Jour d'inspection au Casino de Baden avec le gendarme suisse des jeux

Samedi 6 juillet 2002

Grand Casino Baden AG

Toutes les procédures sont-elles respectées? Les flux d'argent sont-ils surveillés? Avant leur ouverture, les casinos sont passés au peigne fin. Du contrôle des accès à la prise en charge des joueurs pathologiques, la commission fédérale met son nez partout. Reportage en Argovie.

Ils sont les premiers clients et déjà les plus pénibles. Par équipes de quatre ou cinq, les membres de la Commission fédérale des maisons de jeu (CFMJ) visitent, à la veille de leur ouverture les nouveaux casinos de Suisse. Après l'octroi des concessions, annoncé par le Conseil fédéral en octobre dernier, ils ont la charge de délivrer l'«autorisation d'exploiter», ce document qui est le véritable sésame des jeux d'argent, car lui seul permet de recevoir les joueurs, de distribuer les cartes et de faire tourner roulettes et machines à sous.

L'inspection dont dépend sa remise occupe une journée entière et n'a rien d'une formalité. Premier casino A en activité en Suisse, depuis le 27 juin, Lucerne a franchi l'obstacle, mais Crans-Montana, par exemple, a dû repousser son ouverture et Interlaken limiter la sienne aux tables.

Mercredi, c'est le Grand Casino de Baden qui était passé à la loupe. Titulaire de l'unique concession délivrée pour toute la région zurichoise, il se profile comme le numéro un du pays, aligne 265 machines et 23 tables proposant 7 jeux différents, espère quelque 1500 visiteurs par jour, et prévoit plus de 100 millions de francs de revenus bruts par an. Une grosse machine, qui vit son dernier rodage. A deux minutes de la gare, au cœur d'un grand parc, le Kursaal historique de 1875, agrandi et transformé, était encore une ruche avec son hall livré aux derniers peintres et décorateurs.

Interdits de jeux

Dans la grande salle bleu nuit qui abrite les tables, l'ambiance était en revanche feutrée. Dès 8 h 30, croupiers, caissiers et directeurs des jeux ont commencé leurs activités, aux ordres des inspecteurs de la CFMJ. «On commence par la roulette française, faites l'ouverture.» Check-list à la main, Markus Huber observe l'arrivée des jetons, le déverrouillage de la table, réclame une vérification de sa parfaite horizontalité, expérimente diverses situations de jeu. Rare occasion de voir jetons en main un homme qui, comme ses collègues et tous les employés des casinos suisses, est interdit de jeux dans son pays.

«L'objectif, explique-t-il un peu plus tard, est moins de vérifier l'habileté des croupiers que leur maîtrise de toutes les procédures.» En matière de jeux d'argent, le maître mot du contrôle est «traçabilité». Une salle de casino en ébullition peut évoquer le comble du brouhaha désordonné, il ne faut pas pour autant y perdre le cheminement du moindre franc. Règle de base: on peut acheter des jetons un peu partout, mais seules les caisses les retransforment en espèces. Dans le trésor, chaque table dispose de son propre compartiment et fait comptabilité à part. A tout moment, tout doit correspondre. D'accord, la richesse se crée (celle du casino d'abord), mais surtout rien ne se perd.

Tentative de triche

Juriste, Roman Vanek teste de son côté la roulette américaine en cherchant une faille dans son système de doubles jetons. Sur la table, chaque joueur se voit attribuer une couleur et décide de la valeur de ses jetons. «Et que se passe-t-il si j'en garde quelques-uns et que je reviens plus tard en réclamant une valeur plus élevée?» «Le nombre des jetons est contrôlé; dès qu'un manque apparaît, cette couleur aura durant toute la soirée la valeur la plus basse. Et si le client revient un autre jour, il sera évident qu'il y a des jetons de trop.» Allemand comme 70 autres croupiers de Baden (sur 200 employés des jeux), le responsable des tables, Udo Herbst, ne se démonte pas. A l'instar de son collègue Ernesto Sommer, qui s'occupe des machines à sous, il a une longue expérience, et l'on ne résiste pas à dire qu'à eux deux ils font la pluie et le beau temps dans le casino *.

Le royaume d'Ernesto Sommer c'est le sous-sol. Ici trônent les 265 machines, enfin similaires à celles que l'on peut trouver partout ailleurs dans le monde. Finie la «phase d'adresse» et la fréquence régulière de paiement qui étaient des spécialités helvétiques. Désormais, seul le hasard génère le gain, et il est d'ailleurs seul à en avoir le droit. Pour s'en assurer, Guido Bertschy et Jean-Jacques Carron, tous deux ingénieurs de formation, sont les yeux de la CFMJ dans la salle. Ce mercredi, toutes les machines tourneront, et toutes livreront donc des données au système central. «Nous traquons les concordances entre les chiffres des compteurs électromécaniques, qui doivent être relevés, et les données électroniques.» Double sécurité toujours. Sans compter les caméras qui, comme dans tout le casino, surveillent les mouvements.

Sécurité intraitable

Où mènent ces caméras? Les hommes de la CFMJ le verront seuls. Chef de la sécurité, Carlo Bossotto, est intraitable: «Pas de journaliste dans le secteur réservé aux employés.» Son concept étant entièrement basé sur l'étanchéité des zones et des circulations – employés et clients ne se croisent que dans les lieux de jeux – il s'y tient. On saura seulement que la salle de surveillance est occupée 24 heures sur 24, et que les croupiers peuvent toujours l'alerter. Au moindre doute, les images du moment litigieux sont conservées, décortiquées et peuvent être montrées aux clients. Au total, 10% des effectifs du casino sont affectés à la sécurité.

Dernier point névralgique, l'entrée. Pour pouvoir jouer, chaque client doit présenter une pièce d'identité et son nom passe à travers l'ordinateur qui vérifie s'il n'est pas interdit. Surprise! Une erreur de date de naissance et le système laisse passer un employé auquel sa fonction ferme les jeux: «En décidant d'enregistrer davantage de paramètres que nos exigences de base, ils semblent s'être compliqué la vie. Cela mérite réflexion», commente Roman Vanek.

Toujours des rectifications

L'inspection approche de sa fin. Toujours détendu, Ernesto Sommer dit n'y avoir rien trouvé de désarçonnant: «Nous avons travaillé très professionnellement, nous étions prêts», juge le responsable des machines à sous. Il est vrai que, depuis le début de la procédure de concession, Baden fait figure de premier de classe. Résultat? Autorisation d'exploiter accordée, mais quelques rectifications sont quand même demandées ici et là. «Que ce soit pour le casino qui a tout intérêt à fonctionner le mieux possible, ou pour le contrôleur que nous sommes, l'inspection est utile. Toutes celles que nous avons faites ont conduit à des améliorations», commente Yves Rossier, directeur de la CFMJ. D'ici à fin août, Berne, Arosa, Schaffhouse et à nouveau Interlaken et Crans-Montana passeront à leur tour la visite.

*En allemand, Sommer et Herbst signifient respectivement été et automne.

(source : letemps.ch/Laurent Busslinger)




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